Un premier récital m’avait tiré l’oreille, puis un disque de concertos russes, malgré quelques bémols, et confirmé que ce jeune homme lauréat du Van Cliburn était musicien autant que virtuose. Le voilà qui, malgré ses jeunes années, ose les Concertos de Beethoven. Après tout, le jeune Barenboim lui aussi les avait enregistrés, pas même intimidé par la grande stature, physique comme historique, d’Otto Klemperer.
Haochen Zhang a d’emblée, pour porter son art, la direction aussi bienveillante qu’inspirée, de Nathalie Stutzmann qui obtient des Philadelphiens ces lignes fluides, ce discours éloquent, si attentif à l’exactitude du texte. Dans un habillage aussi parfait, le piano élégant, absolument noble du jeune homme se glisse comme dans un gant.
Affinités électives il y a entre son jeu classique, mesuré, au pianisme aussi somptueux que discret, et le lyrisme quasi mozartien déployé par Nathalie Stutzmann dans les deux premiers Concertos. Puis soudain une dimension supplémentaire paraît au long d’un admirable Troisième Concerto, ombreux, intense sans pour autant quitter un certain atticisme : toujours cette simplicité, ces phrasés purs, ce ton mesuré jusque dans l’éclat, et pour le Largo une couleur de prière, des pianissimos méditatifs, qui anticipent sur le sommet de cette intégrale, un Quatrième Concerto lyrique, d’une poésie désarmante, avec le récitatif de l’Andante murmuré face aux déclamations des cordes, moment hors du temps qui rappelle ce que Kempff y osait.
Empereur sur les pointes, divinement joué, porté par un orchestre exultant : ce qui pouvait demeurer encore d’un rien boutonné dans le jeu de Zhang s’y libère, et fait regretter cette Fantaisie avec chœur qui aurait tout naturellement trouvé sa place après le feu d’artifices du Rondo.
LE DISQUE DU JOUR
Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Concerto pour piano et orchestre No. 1 en ut majeur, Op. 15
Concerto pour piano et orchestre No. 2 en si bémol majeur, Op. 19
Concerto pour piano et orchestre No. 3 en ut mineur, Op. 37
Concerto pour piano et orchestre No. 4 en sol majeur, Op. 58
Concerto pour piano et orchestre No. 5 en mi bémol majeur, Op. 73
« L’Empereur »
Haochen Zhang, piano
The Philadelphia Orchestra
Nathalie Stutzmann, direction
Un coffret de 3 SACD du label BIS Records 2581
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Photo à la une : le pianiste Haochen Zhang – Photo : © Benjamin Ealovega