On ne boudera pas ces nouveaux Tréteaux. Vivement enlevés par la battue alerte de Pablo Heras-Casado, le charivari qui ouvre le spectacle donne le ton. On est chez Polignac, dans le respect de la petite formation initiale que permet la géométrie variable du Mahler Chamber Orchestra (certains l’auront largement étoffée tout en restant magnifiques, Ataulfo Argenta, Frühbeck de Burgos), avec un clavecin très présent (Landowska tenait la partie à la création et lorgnait déjà sur le Concerto que Falla lui écrivait), et un Truchement heureusement confié à un enfant, ce dont Falla rêva sans le voir réalisé.

Bravo à Héctor López de Yala Uribe, justesse assurée, débit vif, mots justes, changements de registres pour les incarnations des personnages, le gamin est parfait même si on peut regretter le timbre plus âpre que des sopranos singeant une voix enfantine ont su y mettre. Mais pour les moments les plus poétiques, quel gain ! Un formidable Don Quijote qui ne craint pas la tessiture de son air final et joue plus l’amoureux que le fou, un Maese Pedro sans servilité, tout à son office, font sortir les personnages de la caricature où bien des versions les auront enfermés.

Magnifique alliage de suractivité et de poésie qui se retrouve dans une Suite de Pulcinella calligraphiée, laissant voir derrière les simplifications stravinskiennes les joyeuses inventions de Pergolèse, finesse des phrasés, envol des accents, parfait.

Le sommet du disque reste le Concerto magnifié par Benjamin Alard (qui touche un Pleyel comme le fit Landowska) et la melliflue équipe de solistes emmenée par Chiara Tonelli, geste vif qui n’oublie jamais de chanter les citations de villancicos au long de l’Allegro ; Lento entre mystère et célébration (et sans aridité), Final vraiment giocoso, jubilant, petite merveille qui permet d’attendre celle que Justin Taylor et ses amis mijotent pour Alpha.

LE DISQUE DU JOUR

Manuel de Falla (1876-1946)
El retablo de Maese Pedro
Concerto pour clavecin, flûte, hautbois, clarinette, violon et violoncelle
Igor Stravinski (1882-1971)
Pulcinella – Suite, K034b

Airam Hernández,
ténor (Maese Pedro)
José Antonio López,
baryton (Don Quijote)
Héctor López de Yala Uribe, soprano garçon (El Trujamán)
Benjamin Alard, clavecin Pleyel

Mahler Chamber Orchestra
Pablo Heras-Casado, direction

Un album du label harmonia mundi HMM902653
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Photo à la une : © DR