Une révolution les quatre Légendes que Sibelius composa autour du personnage de Lemminkaïnen au cours des années 1890 ?

Pas pour Susanna Mälkki, qui les entend comme de fabuleuses images sonores, laissant de côté la narration. Cela en déstabilisera plus d’un, moi-même je suis resté un temps étranger à cette manière singulière. À moins que la révolution ne soit ailleurs, non pas dans le geste, mais dans les portées, non dans le vocabulaire mais dans la syntaxe : sa direction si précise ne perd aucune des textures fuligineuses qui décrivent le héros face aux jeunes filles de l’île, faisant entendre les influences françaises qui éclairent un orchestre encore si sombre dans son opus précédent, La Nymphe des bois.

Ce regard pertinent souligne les nombreuses retouches, les réécritures savantes dont Sibelius para trois des quatre poèmes du cycle, et ce jusqu’en 1939 (seul Le Cygne de Tuonela demeura quasi inchangé), et dévoile alors le laboratoire que devint l’Opus 22.

Proposition au fond remarquable, si l’on consent à laisser de côté ce que l’on croit savoir de l’œuvre. L’expérience sera transcendante pour Lemminkaïnen à Tuonela, l’enfer de l’orchestre disant tout, sonnant soudain si moderne.

L’ajout de la Suite « Karelia », du triptyque de Rakastava reste anecdotique face à ces Légendes relues, quel dommage de ne pas les avoir confrontées à La Nymphe des bois !

LE DISQUE DU JOUR

Jean Sibelius (1865-1957)
Karelia Suite, Op. 11
Rakastava, Op. 14
Lemminkaïnen-Suite
(Légendes du Kalevala), Op. 22

Helsinki Philharmonic
Orchestra
Susanna Mälkki, direction

Un album du label BIS Records 26638
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Photo à la une : la cheffe Susanna Mälkki – Photo : © DR