Un étonnement d’abord : l’orchestre manque pour Les Nuits d’été, réduit en squelette par la transcription de Carrie-Ann Matheson, pas pour le Poème de l’amour et de la mer où la pianiste a saisi toute la palette de l’original. On ne sait pas assez qu’Ernest Chausson aura écrit son triptyque pour ténor : Désiré Desmet en assura la création, le compositeur au piano.

Benjamin Bernheim y est idéal, conteur d’abord, et ajoute une version majeure dans une discographie peu fréquentée côté homme : hier Ivan Kozlovski (et en russe), plus récemment Steve Davislim qui vient de nous quitter, les deux avec l’orchestre que Chausson réserva pour les sopranos : l’original est donc seulement ici.

Les Nuits d’été appelle une grande voix, Gérard Souzay y trouvait Eleanor Steber géniale, il aurait applaudi au vaste instrument qu’y déploie Benjamin Bernheim, capable d’allégement sidérant : Sur les lagunes sur un fil, Le spectre de la rose fuligineux, que de poésie dans l’élégance, que de vertige dans l’émotion.

Pourtant, le plus beau du disque reste à venir : les Duparc sont impérissables, L’Invitation au voyage trouble, La Vie antérieure opiacée, Extase tristanesque, Phidylé entre murmure et éclat, le disque se referme sur trois chansons qui ne me consolent pas des autres Duparc qui manquent. Il les faut au complet, Benjamin Bernheim y poserait tout son art face au modèle laissé jadis par Leopold Simoneau.

LE DISQUE DU JOUR

Douce France

Hector Berlioz (1803-1869)
Les nuits d’été, H. 81 (version pour ténor et piano : Matheson)
Ernest Chausson (1855-1899)
Poème de l’amour et de la mer, Op. 19 (version pour ténor et piano : Matheson)
Henri Duparc (1848-1933)
L’invitation au voyage
Extase
Phidylé
La vie antérieure
Joseph Kosma (1905-1969)
Les feuilles mortes (version pour ténor et piano : Leuenberger)
Charles Trenet (1913-2001) / Léon Chauliac (1913-1977)
Douce France (version pour ténor et piano : Leuenberger)
Jacques Brel (1929-1978)
Quand on n’a que l’amour (version pour ténor et piano : Leuenberger)

Benjamin Bernheim, ténor
Carrie-Ann Matheson, piano

Un album du label Deutsche Grammophon 4886155
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Photo à la une : le ténor Benjamin Bernheim – Photo : © Edouard Brane