Maria Gabrys, opus 2

Ce n’est pas le premier disque de Maria Gabryś. Un programme Chopin avait paru chez Arco Diva en 2011, qui m’avait tiré l’oreille. Une artiste, des idées.

Voilà son second opus qui comme le précédent ne tutoie que des chefs-d’œuvre. Mais cet album a deux héros, la pianiste, toujours aussi diseuse, ne choisissant jamais les phrasés d’école, libérant les polyphonies et mettant partout ce sens du rythme qui caractérise son jeu, et le piano lui-même : un Blüthner de 1874, au clavier peu pratique, mais au corps somptueux. Son boisé, sa profondeur, son médium résineux vont comme un gant aux paysages crépusculaires des Klavierstücke Op. 118Maria Gabryś met un ton de légende, pas si loin que cela des Ballades, fermant la boucle du piano de Brahms.

Les trois Klavierstücke Op. Posth. de Schubert étonnent par leur concentration – rien d’extérieur, mais plutôt une poésie amère – et leurs chants altiers, sans atermoiement autre que pour y introduire une dimension fantasque. Maria Gabryś avance quoi qu’il se dise, elle n’aime pas les parenthèses, elle veut garder la ligne générale, l’équilibre. Avec cela, toujours cet art des accents qui galbe la phrase – elle n’est pas polonaise pour rien !

Justement elle termine chez Chopin, laissant la Mazurka Op. 68 No. 4 là où le compositeur l’a abandonnée. Un presque rien pour clore l’album, ce Largo qui pourrait être une romance du dernier Schumann. Artiste à suivre décidément.

LE DISQUE DU JOUR

cover maria gabrys
Franz Schubert (1797-1828)
3 Klavierstücke D 946
Johannes Brahms (1833-1897)
6 Klavierstücke, Op. 118
Frédéric Chopin (1810-1849)
Mazurka en sol mineur, Op. 67 No. 2
Mazurka en la mineur, Op. 67 No. 4
Mazurka en fa mineur, Op. 68 No. 4
Largo en mi bémol majeur, B. 109

Maria Gabryś, pianoforte

Un album du label Ars Produktion ARS 38173

Photo à la une : (c) DR