Henryk Szeryng déroule les longues phrases du Concerto de Nardini d’un archet qui semble infini. La beauté du son, le galbe de la phrase, l’art du trille coulé dans la ligne, j’avais oublié qu’il pouvait être aussi poète. Et virtuose aussi, dans les élans et les rêveries du 4e Concerto de Vieuxtemps, qu’Hans Rosbaud dirige comme du Bruch, ample, résonant, y mettant des paysages inédits.
Tout ce nouvel album de la série violonistique tirée des archives de la SWR par Hänssler Classic documente leur collaboration, jamais illustrée au disque, et nous immerge dans l’âge d’or de l’art de Szeyring, ces années cinquante durant lesquelles il grava pour le label Odéon des microsillons devenus mythiques.
Sommet du disque, un Concerto de Schumann qu’après Georg Kulenkampff et Yehudi Menuhin, Henryk Szeryng remit à l’honneur au concert puis au disque, en gravant la première version stéréophonique pour Philips sous la baguette d’Antal Dorati en 1964. Sept ans plus tôt, dans l’accompagnement plus sec d’Hans Rosbaud, tout y déjà, l’éloquence, le feu, à la manière d’un rapsode – comme improvisée.
Justement ce ton plein d’esprit et de panache colle parfaitement à Tzigane de Ravel. Voilà bien longtemps qu’on ne trouve plus en CD sa gravure de studio avec Edouard van Remoortel. Celle-ci, toute monophonique qu’elle soit, l’emporte par son caractère capricieux.
LE DISQUE DU JOUR
Pietro Nardini (1722-1793)
Concerto pour violon en en mineur
Henri Vieuxtemps (1820-1881)
Concerto pour violon et orchestre No. 4 en ré mineur, Op. 31
Maurice Ravel (1875-1937)
Tzigane
Robert Schumann (1810-1856)
Concerto pour violon et orchestre en ré mineur, WoO 23
Henryk Szeryng, piano
SWR Sinfonieorchester Baden-Baden und Freiburg
Hans Rosbaud, direction
Un album du label Hänssler Classic CD94229
Photo à la une : (c) DR – Photo : Collection Philips