Je l’attendais depuis longtemps cette intégrale du piano de Mendelssohn, enfin une intégrale qui puisse rivaliser avec celle de Rena Kyriakou enregistrée jadis par Vox sur son somptueux Bösendorfer, modèle de style, de virtuosité, de profondeur et de brio. Martin Jones s’y était révélé littéral et un rien ennuyeux, tout le contraire pour Howard Shelley qui une fois l’an nous dévoile un nouveau volume.
Cette fois, il articule son programme autour des Trois Caprices Op. 33. Mendelssohn y marie Bach aux fées, œuvre prodigieuse, musique pour des toiles de Füssli, où il faut mettre une imagination dans les registres, des arrières plans dans les phrasés, transmuer le piano en harpe éolienne – une œuvre pour Kempff, la jouât-il jamais ? Shelley s’y révèle fin pianiste, virtuose sans ostentation, mais surtout poète comme dans le Scherzo a Capriccio où passent des échos du Songe d’une nuit d’été. Magique.
La Sonate Op 105, dont le discours aventureux est piqué de bizarreries résonne sans crispation, porté par ce toucher naturellement plein et pourtant léger. Un Lied isolé clôt le volume, passionné, joué avec élan, après que Shelley ait offert un Sixième cahier des Lieder ohne Worte caressé comme en rêve. Peu à peu se construit une intégrale qui rendra justice à une des grandes œuvres du piano romantique.
LE DISQUE DU JOUR
Felix Mendelssohn-Bartholdy (1809-1847)
The Complete Solo Piano Music, Vol. 3
Étude en fa mineur, WoO1
Scherzo en si mineur, WoO2
Scherzo a capriccio en fa dièse mineur, WoO3
3 Caprices, Op. 33
Sonate pour piano en sol mineur, Op. 105
Lieder ohne Worte (Romances sans paroles), Cahier IV, Op. 53
Lied en fa dièse mineur
Howard Shelley, piano
Un album du label Hyperion CDA68098
Photo à la une : (c) DR