Sabine Weyer entre dans la Suite en la lentement, comme célébrant un mystère. Son Rameau, si divers de timbres, articulé dans la profondeur du clavier, pourrait se résumer dans ce Prélude si ombreux dont même la partie vive s’écoule, fluide, rapide, d’un toucher quasi rêvé.

Certains ne supporteront pas la lenteur sans ostentation qu’elle met un rien trop uniment à toute la Suite, mais qui laisse l’espace à Rameau pour épanouir sa musique dans le grand son d’un piano moderne. La tendre constance qu’y met Sabine Weyer s’anime avec une grâce irréelle pour une Vénitienne anthologique lançant les trois danses finales. Mais c’est à nouveau comme en songe qu’elle distille le Menuet.

Tout ce que ce clavier peut modeler sans que jamais ne paraisse un marteau – Sabine Weyer est du clan des « ondistes », pas si loin que cela de Walter Gieseking ou de Marcelle Meyer – va comme un gant au deux Livres d’Images de Debussy qui encadrent la Suite de Rameau. Timbres profonds, jeu pensé par la couleur, irisations, temps suspendu même dans Mouvement, hypnotique, la jeune femme est chez elle dans ce piano français qu’elle devra continuer d’explorer : le seul reproche qu’on puisse faire à son premier disque est d’être trop bref.

LE DISQUE DU JOUR

Jean-Philippe Rameau (1683-1764)
Pièces de clavecin, Suite en la (Premier Livre, 1706)
Claude Debussy (1862-1918)
Images, Livre I
Images, Livre II

Sabine Weyer, piano

Un album du label Orlando Records or0015
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Photo à la une : © DR