Les deux Sonates que Brahms écrivit pour le violoncelle ne se livrent pas aisément. Jadis, Jacqueline Du Pré les empoignait avec une éloquence qui en bouleversa la discographie.
Bruno Philippe a décidé de les jouer dans une lumière diffuse, sur le fil subtil du piano de Tanguy de Williencourt, de véritables musiques d’automne, et l’occasion pour son archet de créer des sfumatos étranges, tout un art de phraser d’abord dicté par la couleur et le sentiment.
Pour la rêveuse et assez mélancolique Sonate en mi mineur, le ton est idéal et les accents de cette déambulation ont quelque chose de quasiment fauréen parfois, tant l’archet ne veut pas appuyer mais chante pourtant.
Idée éclairante, placer entre les deux Sonates les Fantasiestücke de Schumann, triptyque bercé par les mêmes paysages d’automne et des atmosphères de conte. Le lien est parfait entre le Rasch und mit Feuer qui referme ce trop bref cahier et l’Allegro vivace de la Sonate en fa majeur, même intensité, même couleur, même feu.
Dans les quatre mouvements de cet opus passionné, les deux amis tissent un discours sur les pointes, allusif – l’Adagio affetuoso est dit avec une pudeur extrême – distillant une lumière finement réglée. Bien vu, je reviendrai à ce disque dont le ton singulier suffit à lui faire une place aux côtés des grandes versions laissées par leurs aînés.
LE DISQUE DU JOUR
Johannes Brahms
(1833-1897)
Sonate pour violoncelle et piano No. 1 en mi min, Op. 38
Sonate pour violoncelle No. 2 en fa majeur, Op. 99
Robert Schumann
(1810-1856)
Fantasiestücke, pour violoncelle et piano, Op. 73
Bruno Philippe, violoncelle
Tanguy de Williencourt, piano
Un album du label Evidence Classics EVCD012
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Photo à la une : © Caroline Doutre