En 1994, la Radio de Cologne captait un stupéfiant Mandarin merveilleux – ballet intégral, ce sont les musiciens qui prennent également la partie du chœur – enflammé par le Gustav Mahler Jugendorchester.
Timbres profonds et coupants, nuit intense des cordes, brasier des cuivres. Un ballet ? Un rituel de sexe et de sang que Peter Eötvös conduit avec une impassibilité terrifiante. Il regarde, voyeur de ce meurtre qui n’en finit pas, laissant la musique de Bartók tisser son piège, les jeunes musiciens immergés dans la partition la font rayonner de tous ses sombres feux. Lecture admirable et horrifique qui se hisse auprès de celles d’Antal Doráti et de Pierre Boulez.
Deux ans plus tôt, les mêmes se cherchaient encore un peu dans un Concerto pour orchestre cette fois capté bien sèchement à Bergame ; mais si la rumeur de l’Introduzione reste un rien distante, le Giuoco delle coppie, ironique, persiffleur, un rien macabre, donne bien le ton d’une interprétation qui entend créer cinq atmosphères successives nettement opposées. Merveille, l’Intermezzo, fluide, dont la chanson troubadour se pare d’une étrange nostalgie.
Mais rien n’y fait, c’est pour le fabuleux Mandarin que vous vous procurerez ce disque passé quasi inaperçu lors de sa parution voici bientôt … quinze ans !
LE DISQUE DU JOUR
Béla Bartók
(1881-1945)
Le Mandarin merveilleux, pantomime pour orchestre (Ballet intégral), Op. 19, Sz. 73, BB 82
Concerto pour orchestre, Sz.116, BB 123
Gustav Mahler Jugendorchester
Peter Eötvös, direction
Un album du label Budapest Music Center BMCCD058
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Photo à la une : © Marco Borggreve