Cornelius Meister poursuit son voyage brucknérien en juxtaposant deux partitions qu’on assemble rarement, la Messe en fa mineur et la Neuvième Symphonie.
Pour la vaste Messe écrite durant les années 1867-1868 où Bruckner semble vouloir approcher de la Missa Solemnis mais se voit sans cesse rattrapé par le lyrisme des opus sacrés de Schubert, le ton est d’emblée trouvé, lumineux, simple, évident. J’entre dans ce vaisseau serein avec enfin un sentiment d’évidence, même si Ruth Ziesak s’y époumone de son aigu désormais vinaigré : il ne faut pas lui comparer Margaret Price, souveraine malgré les tempos irrespirables que lui imposait Sergiu Celibidache !
Plus aucune évidence au contraire dans une Neuvième Symphonie délétère, très noire, à l’agogique torturée, sans aucune transcendance, dirigée âpre et tonnante. C’est lu au cordeau, d’une terrible exactitude qui refuse l’inspiration mais va très loin dans la part sombre de cette musique des ténèbres. Même l’Adagio se refuse à toute sérénité, amer, avec déjà des accents mahlériens.
Au moment où quasiment tous les chefs font leur Bruckner allégés sous prétexte de philologie, Cornelius Meister, une fois de plus, rappelle que son art regarde vers celui des grands anciens. Décidément, il n’est pas de son temps et ce n’est pas moi qui m’en plaindrais !
LE DISQUE DU JOUR
Anton Bruckner (1824-1896)
Messe No. 3 en fa mineur,
WAB 28
Symphonie No. 9 en ré mineur,
WAB 109
Ruth Ziesak, soprano
Janina Baechle, mezzo-soprano
Benjamin Bruns, ténor
Günther Groissböck, basse
Wiener Singakademie
ORF Vienna Radio Symphony Orchestra
Cornelius Meister, direction
Un album de 2 CD du label Capriccio C5247
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Photo à la une : © Rosa Frank