Changement total d’horizon. Pour la musique, retour en des terres « classiques » avec Hiroaki Takenouchi. Au programme se trouvent six Sonates de Haydn, dont quelques-unes mal-aimées de pianistes (la Sonate en mi bémol majeur, Hob.I :25), très délicates à mettre en place. Ce vendredi se partage encore entre nos deux musiciens.
Pendant que Frédéric Briant travaille à la balance avec Hiroaki, entre 9h30 et 11h15, Jean-Baptiste Millot photographie Vestard – petite promenade à l’extérieur, session portrait, avec les vêtements décontractés de notre pianiste Letton. Jean-Baptiste s’estime très satisfait, ce qui promet de magnifiques photos, très contrastées, et riches en couleurs, poses et atmosphères. Puis, lorsque Vestard réécoute l’ensemble des Rachmaninov, dont la phase de l’editing fut court en raison du peu de prises à monter, et que Frédéric avait réalisé au fil des précédents jours, écoute à la suite de laquelle Vestard s’estimera pleinement satisfait – il peut !- Jean-Baptiste photographie Hiroaki. Quelques prises au piano, puis une petite promenade à l’extérieur.
Au retour, Jean-Baptiste m’assure – là aussi – qu’il en est très content, et qu’il a pu réaliser notamment de beaux portraits. Avant la pause déjeuner, dans notre cher Belacanto, dans la rue principale de Neumarkt, Millot réalise quelques photos de Vestard au piano, en tenue de concert. Tout le monde semble décidément satisfait : les artistes, le photographe, et l’ingénieur du son, passionné, lui, voire intrigué par la nouvelle couleur sonore qu’il aura cherchée et trouvée pour la session avec notre musicien japonais, plus analytique et au plus près des marteaux de l’instrument. L’après-midi de ce vendredi 7 verra le début de l’enregistrement des Haydn.
un jeu d’une haute sophistication, d’une finesse expressive incomparable, et d’une grande souplesse dans les attaques.
Pour commencer, Hiroaki Takenouchi a choisi de s’attaquer durant ce premier jour à deux Sonates, assez complètes d’expression, de subtilité digitale et d’inventivité, les Sonates Hob.XVI:30 & Hob.XVI:39. Le musicien japonais n’enregistre pas forcément les œuvres dans l’ordre de leurs mouvements. Il y a une inspiration différente selon les heures de la journée, et il est primordial à ses yeux de choisir le bon moment pour enregistrer des mouvements aussi divers que ceux qu’élaborent Haydn dans ces Sonates.
Cet après-midi là, il commençait donc par une longue et belle cantilène, le mouvement lent, en ut majeur, de la Sonate Hob.XVI:39. Il prend un tempo assez allant, dans un premier temps, et la couleur chaude de son interprétation, les vibrations presque palpables des marteaux rendent ce premier moment – première prise réalisée par Hiroaki Takenouchi pour Artalinna – presque magique. Takenouchi tentera une autre prise, plus lente encore, au toucher plus épuré, et pointilliste, dans un esprit moins proche de l’ « Empfindsamkeit » de Carl Philipp Emanuel Bach que certaines des premières pages de Beethoven (Sonates Nos. 1 à 3).
Ces toutes premières prises de Takenouchi dévoilent un jeu d’une haute sophistication, d’une finesse expressive incomparable, et d’une grande souplesse dans les attaques, qui provient directement – dans le cas précis – d’une pratique assidue, pendant plusieurs années, des instruments anciens. Une vision où l’on sent la présence des marteaux, le questionnement de l’instrument. Durant ce premier jour, nous prenons cependant notre temps, nous trouvons surtout nos repères, nous testons, nous expérimentons.
Et, musicien du soir, Hiroaki montrera une énergie démultipliée en soirée, moment où il abordera notamment le Tempo di Menuet de la Sonate Hob.XVI:30, après avoir abordé particulièrement dans le détail les Finale des deux Sonates du jour.
Photo: (c) Pierre-Yves Lascar – Février 2014