Ce n’est plus un secret, au centre des opéras de Janáček, de tous ses opéras, un personnage supplémentaire – et décisif – s’invite : l’orchestre. Au point que les chefs d’orchestre ont voulu les faire leurs et les porter au concert.
Tout récemment, Manfred Honeck s’est assemblé une Suite d’après Jenůfa où tout l’opéra se trouve synthétisé. C’est quasiment de la musique de film, les puristes hurleront mais j’adore, car le geste impérieux qui la parcourt dit tout de l’univers de Jenůfa, et d’abord sa détresse. C’est par cette reconstruction pertinente que Tomáš Netopil ouvre son disque, brillant, un peu lisse parfois, mais utile, d’abord par cette Jenůfa d’orchestre, ensuite par le décalque plus terrifiant que Jaroslav Smolka tira de Kátia Kabanová, où soudain Netopil trouve les sonorités âpres, le rythme fiévreux de l’original. C’est que Smolka a réalisé un travail d’orfèvre, une vraie composition où sont repris les procédés d’écriture de Janáček. Cela sonne avec une terrible tension et est enregistré en première mondiale.
Pourtant, il y a encore mieux : la suite brillante et sombre à la fois qu’arrangea à son usage František Jílek pour ce chef-d’œuvre longtemps disparu qu’est Osud, Le Destin, et qu’il fut le premier à retrouver et à graver intégralement, prémonition musicale et dramatique de ce que parachèvera L’Affaire Makropoulos dans le monde lyrique de Janáček, musique fabuleuse réglée ici comme un étrange ballet de sons, le plus secret du théâtre musical du musicien de Brno y est enchâssé.
Et maintenant un second volume : De la maison des morts, La Petite renarde rusée attendent.
LE DISQUE DU JOUR
Leoš Janáček (1854-1928)
Jenůfa – Suite orchestrale
Kátia Kabanová –
Suite orchestrale
Osud
Orchestre Symphonique de la Radio de Prague
Tomáš Netopil, direction
Un album du label Supraphon SU4194-2
Acheter l’album sur le site www.clicmusique.com, ou sur Amazon.fr
Photo à la une : © DR