Thomas Dausgaard est décidément chez lui dans la musique viennoise du début du XXe siècle : ses deux versions – l’une en studio, l’autre au concert – si sombres de la Seejungfrau de Zemlinsky le signalaient, cette torrentielle 10e Symphonie de Gustav Mahler (dans la seconde mouture de Deryck Cooke) fait plus que le confirmer : tempos vifs, accents lyriques, contrastes saisissants, qui changent drastiquement le visage de cet opus ultime.
Un tombeau ? Un dithyrambe, passionné, emporté, fusant, qui transforme le premier Scherzo en une irrésistible danse d’Apollon. Ce n’est plus un adieu à la vie que chantent les vastes phrases de cordes de l’Adagio, mais la musique de mondes nouveaux dans laquelle Thomas Dausgaard restitue enfin les glissandos des violons tels que Mahler les a notés. Le Purgatorio est un ballet d’étoiles, et le Finale déploie un vaste coucher de soleil, emplies de teintes inouïes, musique ouverte, rayonnante jusque dans le pianissimo, en rien funèbre.
Si le geste du chef danois est admirable, ses musiciens ne le sont pas moins. Depuis que le Seattle Symphony a été confié aux bons soins de Ludovic Morlot, l’orchestre de la mégapole de l’État de Washington est en passe de devenir l’une des premières phalanges des États-Unis. La qualité de tous les pupitres de vents, l’équilibre d’un quatuor subtil, la perfection du jeu d’ensemble me laissent disque après disque admiratif. Et si cette Dixième passionnée était le premier volume d’une intégrale Mahler ? Je l’espère.
LE DISQUE DU JOUR
Gustav Mahler (1860-1911)
Symphonie No. 10
(seconde version Deryck Cooke, 1976)
Seattle Symphony Orchestra
Thomas Dausgaard, direction
Un album du label Seattle Symphony SSM1011 (distribution : Outhere)
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Photo à la une : © DR