Deux récitals pour Deutsche Grammophon, que l’Europe n’aura jamais connus – un récital Liszt, puis un album russe où déjà figurait Pétrouchka – m’avaient signalé le talent de Christopher Park – vingt-neuf ans, pianiste allemand partagé entre école germanique et russe.
Ce grand son plein de caractère, ce brio, ce sens si particulier du tactus musical comme inféodé à une narration, ne s’oubliaient plus. Le voici signant chez le meilleur éditeur de piano allemand, Oehms, recrue de choix. Il ouvre son nouveau récital avec une Fantaisie de Schumann si dite, si emportée, si volontaire jusque dans la diction rythmique qui est une de ses signatures, qu’elle en fera grincer plus d’un.
Pas moi, j’admire le geste, les moyens considérables, une sorte de folie et ses couleurs insensées qui peinent parfois à se laisser capturer par les micros. Les couleurs, vives, chamarrées, débordent sa lecture spectaculaire de Pétrouchka, comme si l’orchestre entrait d’un seul geste dans le piano, expérience fascinante qui montre à quel point sa virtuosité incendiaire se plie à l’art de la suggestion, sait créer des paysages mais aussi du pur théâtre. Génial, pas si loin, que cela du geste démiurgique qu’y imprimait le cher Shura Cherkassky.
L’opus de Neuwirth, écho sonore plein de gamelans et de tablas à la gigantesque statue d’Anish Kappoor dévoilée par la Tate Gallery en 2003, n’ajoute rien de plus mais fait toujours admirer cet art des timbres, ce piano orchestre.
C’est bien, mais pour une suite, j’aimerai un album monographique. Les grands cycles de Variations de Brahms ? Au Klavier-Festival Ruhr 2016, Christopher Park avait donné une version d’anthologie des Haendel.
LE DISQUE DU JOUR
Robert Schumann (1810-1856)
Fantaisie en ut majeur, Op. 17
Igor Stravinski (1882-1971)
Trois Mouvements de Pétrouchka
Olga Neuwirth (né en 1968)
Marsyas
Christopher Park, piano
Un album du label Oehms Classics OC1863
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Photo à la une : © Michael Dannenmann