Friedrich Gulda enregistra côté jazz quelques-uns de ses plus parfaits albums pour le label MPS. On sait moins qu’il grava aussi pour cet éditeur quelques disques consacrés à son répertoire de concertiste, notamment un Clavier bien tempéré qui étonna par ses partis-pris, lecture à ras du clavier que captaient des micros placés aux ras des cordes.
On était à la fin des années soixante, temps de toutes les audaces. Gulda voulut également graver dans ces mêmes conditions ses chers Préludes de Debussy dont il avait délivré une version iconoclaste mais géniale pour Decca dix ans plus tôt. Les micros dans le piano n’allaient-ils pas tuer leurs mystères ?
C’était sans compter sur l’art du toucher, de la suggestion, ces sfumatos millimétrés, cette pédale de prestidigitateur que Gulda employait avec une pointe de génie dans le répertoire français (ses Ravel, moins connus, procèdent de même). Ce Debussy parfois âpre – La puerta del Vino en déconcertera plus d’un – questionne avec une sorte d’insolence car il ne ressemble à aucun autre, exposant les singularités d’un génie tutoyant un autre génie.
Feux d’artifice dissout dans ce silence mat me laisse pourtant songeur : je n’ai pas entendu les Préludes de Debussy, j’ai assisté à une expérimentation. Vous laisserez-vous tenter ?
LE DISQUE DU JOUR
Claude Debussy (1862-1918)
Préludes pour piano,
Livre I, L. 125
Préludes pour piano,
Livre II, L. 131
Friedrich Gulda, piano
Un album du label MPS 0300973MSW
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Photo à la une : © Hasenfratz