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Concerto Monde

David Lively est revenu récemment, avec l’Orchestre de la Garde Républicaine, au Concerto de Busoni, l’occasion pour la SWR de rééditer l’enregistrement qu’il en effectua sous la baguette implacable de Michael Gielen le 13 février 1990, version qui a pris place au sommet de la discographie aux côtés de celles de John Ogdon et de Noel Mewton-Wood.

Sa virtuosité ailée ne fait qu’une bouchée des escarpements dont Busoni a truffé sa terrible partition, jusque dans All’Italiana, joué avec une décontraction trompeuse : l’art y cache l’art, surtout le pianiste américain est sensible aux sous-textes qui irriguent l’œuvre : derrière l’Aladdin d’Oehlenschläger dont le chœur d’hommes du Finale loue la magnificence d’Allah, se cache la figure de Goethe et son Premier Faust plus encore que sa Théorie des couleurs. Les épisodes les plus virtuoses sont comme pimentés d’un souffre méphistophélique qui éclate à plein dans la cadence apoplectique précédant l’élévation spirituelle du Cantico.

L’alliage entre ce piano omniscient et l’orchestre visionnaire de Michael Gielen, qui délie l’œuvre du post-romantisme pour la projeter dans le XXe siècle, magnifie cette partition hors normes, en saisit tous les visages, l’éclaire et l’envole, expérience assez fabuleuse enfin à nouveau accessible.

LE DISQUE DU JOUR

Ferruccio Busoni (1866-1924)
Concerto pour piano et orchestra en ut majeur, Op. 39, BV 247

David Lively, piano
Herrenchor des Freibrurger Vokalensemble, mezzo-soprano
SWR Sinfonieorchester Baden-Baden
Michael Gielen, direction

Un album du label SWR Music SWR19141CD
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Photo à la une : le pianiste David Lively – Photo : © Philippe Matsas

Les autres visages de la Stupenda

Decca se lance dans une édition tout Sutherland. Premier volume les songs, mélodies, oratorios, airs en dehors des intégrales. Ce parcours est-il si connu ? Qui se souvient dans les méandres de sa discographie de ce Libera me terrorisé qu’elle offre à Vienne pour Sir Georg Solti, gravure qui aligne Horne, Pavarotti, Talvela et qui reste l’un des enregistrements majeurs du Requiem de Verdi ? Sa voix, ce liquide d’or, s’y élève au sublime dans un pianissimo de voie lactée.

L’art du bel canto incarné, elle le fut, tout australienne qu’elle soit, ses premiers disques de son temps de Londres rappellent qu’elle déchiffrait tout à vue, même le Songs of Welcome de Bliss – la BBC conserve aussi le soprano du Klagende Lied, la Jenifer du Midsummer Marriage – une musicienne consommée à la curiosité aiguisée, qui se languissait du temps de la Pasta et avait les moyens vocaux de les ressusciter.

Retrouver serait sa raison, réincarner l’objet de son art dès l’album « The Art of the Prima Donna » allant de Arne à Verdi, grand écart qui n’échauffait pas les muscles de cette voix de lait.

Sublime fatalement chez Haendel dont elle réenchantait le premier belcanto jusque dans Le Messie de Boult, délicieuse pour les « Serrate » de Rossini, et subliment exotique chez Mozart : on attendait ce feu pour l’Exsultate, jubilate, moins la ligne de Porgi amor et certes elle n’est pas Margaret Price ! Pourtant quelle Comtesse, qui sera à son mieux dans Dove sono, et ce Chérubin, le croyait-on simplement probable ? Plus probablement que Senta, Sieglinde ou Isolde, et pourtant…

L’édition est somptueuse, premier volume d’une triade que je suivrais attentivement, mais comment expliquer que Decca néglige autant son autre prima donna, Renata Tebaldi, dont elle a oublié voici deux ans le centenaire de la naissance et semble toujours aussi muette pour cette année où l’on commémore les vingt ans de sa disparition. Vergogna !

LE DISQUE DU JOUR

Joan Sutherland, soprano
The Complete Decca Recordings Recitals & Oratorios

Œuvres de Arthur Bliss (1891-1975), Johann Sebastian Bach (1685-1750), Gaetano Donizetti (1797-1848), Giuseppe Verdi (1813-1901), Ludwig van Beethoven (1770-1827), Thomas Arne (1710-1778), Georg Friedrich Haendel (1685-1759), Vincenzo Bellini (1801-1835), Gioacchino Rossini (1792-1868), Charles Gounod (1818-1893), Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791), Ambroise Thomas (1811-1896), Leo Delibes (1836-1891), Giacomo Meyerbeer (1791-1864), Carl Maria von Weber (1786-1826), Jules Massenet (1842-1912), Ruggero Leoncavallo (1857-1919), Julius Benedict (1804-1885), Luigi Arditi (1822-1903), Francesco Paolo Tosti (1846-1916), Friedrich von Flotow (1812-1883), Michael William Balfe (1808-1870), Sir Henry Rowley Bishop (1786-1855), Niccolo Piccinni (1728-1800), Giovanni Battista Lampugnani (1706-1786), Giovanni Battista Bononcini (1670-1747), William Shield (1748-1829), François-Adrien Boieldieu (1775-1834), Noel Coward (1899-1973), Sigmund Romberg (1887-1951), Richard Rodgers (1902-1979), Jerome Kern (1885-1945), Rudolf Friml (1879-1972), Victor Herbert (1859-1924), Harold Fraser-Simson (1872-1944), Jacques Offenbach (1819-1880), Carl Zeller (1842-1898), Carl Millöcker (1842-1899), Leo Fall (1873-1925), Oscar Straus (1870-1954), Franz Lehar (1870-1948), Fritz Kreisler (1875-1962), George Posford (1906-1976), Reinhold Gliere (1875-1956), Igor Stravinski (1882-1971), Cesar Cui (1835-1918), Alexander Gretschaninov (1864-1956), Gustave Charpentier (1860-1956), Georges Bizet (1838-1875), Charles Lecocq (1832-1918), Victor Massé (1822-1884), Gabriel Fauré (1845-1924), Antonin Dvorak (1841-1904), Felix Mendelssohn Bartholdy (1809-1847), Frank La Forge (1879-1953), Reynaldo Hahn (1875-1947), Edvard Grieg (1843-1907), Ottorino Respighi (1879-1936), Pietro Cimara, Edouard Lalo (1823-1892), Cécile Chaminade (1857-1944), Adolphe Adam (1803-1856), Richard Wagner (1813-1883), Luigi Denza (1846-1922), Conradin Kreutzer (1780-1849), Otto Nicolai (1810-1849), Franz Lachner (1803-1890), Heinrich Proch (1809-1878), Frantisek Skroup (1801-1862)

Un coffret de 37 CD du label Decca 4854356
Acheter l’album sur le site du label www.jpc.de, sur le site du label Deutsche Grammophon ou sur Amazon.fr

Photo à la une : la soprano Joan Sutherland – Photo : © DR

Labour of Love

L’odyssée Haendel de Sir Neville Marriner serait-elle le moins repéré de ses voyages ? Dispersée entre plusieurs labels, son centre se trouve pourtant chez Argo, part majeure, et fondatrice du coffret qu’assemble aujourd’hui Cyrus Meher-Homji. Continuer la lecture de Labour of Love