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Ultima Verba

Graz, la nouvelle édition du Festival Styriarte bat son plein, Nikolaus Harnoncourt et son Concentus Musicus poursuivent leur nouveau cycle Beethoven, osant la Missa Solemnis que le chef autrichien avait jusque-là dirigée avec des effectifs plus conséquents (si vous deviez choisir entre les deux versions qu’il avait gravées auparavant, préférez plutôt le DVD documentant un récent concert au Concertgebouw d’Amsterdam que la gravure discographique de 1992 pour Teldec).

Revenant à cette œuvre qui l’aura accompagné durant toute sa maturité, Harnoncourt ne semble plus certain de rien. Il se débarrasse naturellement de la tradition et tourne même le dos à une lecture stupéfiante qui le passionnait encore voici quatre ans à Amsterdam. Il cherche partout le rayonnement du verbe, suspend le temps musical pour le remplacer par des forêts de mots et de sons, expérimente des alliages de timbres surprenants entre le chœur et les instruments : comme si le nouveau monde sonore inouï entendu par Beethoven se composait juste là sous vos yeux. C’est plus d’une fois dérangeant, mais toujours pertinent, ce n’est pas une proposition, mais un questionnement où se résume en fait parfaitement l’éthique de son art.

N’entrera pas ici qui veut absolument entendre un chef-d’œuvre, mais celui incertain même de son rapport à cette musique y trouvera autant de questions que de réponses : la Missa solemnis devient enfin ce livre-monde, ouvert à l’infini. Cette expérience aura probablement été filmée, répétitions comprises, et les éditions du Festival Styriarte en proposera probablement un ultime double album de DVD comme elle l’a fait régulièrement pour les autres apparitions d’Harnoncourt à Graz. Il n’est d’ailleurs pas certain que cet ultima verba le soit : tous redonnaient la Missa à Salzbourg le 22 juillet (2015), les caméras de la télévision autrichiennes étaient là. Qui sait si le laboratoire de Graz aura alors réalisé pleinement ses promesses. Mais déjà ici, impossible de ne pas trembler de joie en écoutant le Dona nobis pacem.

LE DISQUE DU JOUR

cover beethoven solemnis harnoncourt sonyLudwig van Beethoven (1770-1827)
Missa solemnis, pour solistes, chœur et orchestre, Op. 123

Laura Aikin, soprano
Bernarda Fink, mezzo-soprano
Johannes Chum, ténor
Ruben Drole, baryton-basse
Arnold Schönberg Chor
Concentus Musicus Wien
Nikolaus Harnoncourt, direction

Un album du label Sony Classical 8985313592
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Photo à la une : © DR

Machine à remonter le temps

Fait assez rare pour être souligné : Decca, l’éditeur de Nelson Freire aujourd’hui, publie un double album de concertos issu de sources radiophoniques diverses. Ce Radio Days en bluffera plus d’un, il nous rend Freire dans la vingtaine et le début de sa trentaine, et là où il fut vraiment toujours chez lui : au concert.

Ambitus 1968-1979, territoire Allemagne Continuer la lecture de Machine à remonter le temps

L’autre Beethoven

Étonnant corpus. Le violoncelle selon Beethoven est uniquement chambriste, les instruments de l’époque au volume sonore discret le commandaient d’autant plus que la formation symphonique s’augmentait sans cesse. Les pages titres des éditions indiquent parfois, à l’ancienne mode, « sonate pour piano-forte avec accompagnement de violoncelle », mais au fond Continuer la lecture de L’autre Beethoven

De l’art de bien rééditer – Vol. 1

À la mémoire de Nicolas Baron, le meilleur d’entre nous

Que se passe-t-il chez les majors ? On déboîte, on remboîte, on collationne, on éparpille, on regroupe, on propose des biais thématiques qui n’épuisent pas les thèmes, des portraits d’artistes où les lacunes en autoriseront de suivants : le discophile croit s’y retrouver sans bourse déliée mais s’y perd en fait. Argument Continuer la lecture de De l’art de bien rééditer – Vol. 1