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Concerts pour le crépuscule

Dans son quotidien avec Couperin, les Concerts royaux auront accompagné Christophe Rousset d’abord à son seul clavecin, dialogue d’ombres, danses en apesanteur, tout un monde en soi où les instruments amis auraient semblé inutiles.

Aujourd’hui, il y revient avec trois dessus qu’exposent un continuo secret, discret, merveille de pudeur, d’élégance qui laisse chanter tout un monde obscur, crépuscule de sons d’une entêtante poésie qui laisse voir des ballets de notes. La touche agreste du hautbois, les unissons mélancoliques des trois amis, le continuo qui danse et virevolte, léger, tout compose une musique pour l’intimité, vision opposée à celle splendide et opulente, de l’ensemble Les Timbres que j’avais tant goûtée.

Mais les chemins d’ombre de Christophe Rousset et de ses amis, la viole admirable d’Atsushi Sakaï vont plus loin dans les secrets tendres de ce Couperin qui devait enchanter le calvaire des ultimes soirées du Roi.

LE DISQUE DU JOUR

François Couperin (1668-1733)
Concerts royaux (1722)

Les Talens Lyriques
Christophe Rousset, clavecin et direction

Un album du label Aparté AP196
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Photo à la une : © DR

Rome vaincra

Le livret preste que Nicolas-François Guillard déduisit de l’Horace de Pierre Corneille (au passage exit Julie et Sabine), fut pris au pied de la lettre par Salieri, qui aura composé ici son opéra le plus resserré – un peu moins d’une heure et demie -, continuel crescendo qui épuisa autant la cour de Louis XVI en villégiature à Fontainebleau que l’Académie Royale de Musique lors de la reprise de l’ouvrage qui renonçait au suicide de Camille, la laissant seulement abandonnée dans les célébrations de la victoire de Rome sur Albe.

Christophe Rousset, qui avait déjà enflammé Les Danaïdes, ouvrage autrement foisonnant, entend donner toutes ses chances à cet opéra bodybuildé, qui enchaine dans un tempo dramatique dont l’objectif est de couper le souffle scènes spectaculaires et airs lyriques, autour du dilemme entre l’amour et le devoir.

Aussi brillant et bruyant que soit l’art de Salieri, il parvient parfois à émouvoir lorsque, abandonnant le tumulte, il écrit dans une veine toute gluckiste le magnifique « Victime de l’amour, victime de l’honneur » que Cyrille Dubois embaume de son timbre. Quel Curiace ! C’est d’ailleurs l’autre force de cette gravure, une distribution impeccable où Judith van Wanroij accepte tous les risques pour incarner Camille. Les amoureux malheureux sont entourés par une troupe splendide où brille particulièrement le Jeune Horace de Julien Dran.

Christophe Rousset mène le tout grand train, me faisant déjà attendre avec impatience la prochaine étape de son voyage chez Salieri. Edition soignée, comme toujours dans cette série lyrique chez Aparté.

LE DISQUE DU JOUR

Antonio Salieri (1750-1825)
Les Horaces (1786)

Judith van Wanroij, soprano (Camille)
Cyrille Dubois, ténor (Curiace)
Julien Dran, ténor (Le jeune Horace)
Jean-Sebastien Bou, baryton (Le vieil Horace)
Philippe-Nicolas Martin, baryton (L’Oracle, Une Albain, Valère, Un Romain)
Andrew Foster-Williams, baryton (Le grand Prêtre, Le grand Sacrificateur)
Eugènie Lefebvre, soprano (Une suivante de Camille)

Les Chantres du Centre de Musique Baroque de Versailles
Les Talens Lyriques
Christophe Rousset, direction

Un album/livre-disque de 2 CD du label ApartéAP185
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Photo à la une : © DR

Ténor Mozart

Le drame posthume de Mozart : avoir écrit pour des chanteurs qui en scène n’avaient d’autre horizon que l’Italie et son nouveau chef-d’œuvre culturel, l’opéra, seria ou pas, et dans la bouche la langue ultramontaine ; puis retrouvé au XXe siècle, sacré roi absolu de la musique savante à l’égal de Bach, Haendel ou Beethoven, d’avoir eu seulement pour lui faire fête des chanteurs de langue germanique, capables même d’inventer des consonnes pour se faire « leur » italien. Continuer la lecture de Ténor Mozart