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Le chant pur

Ceux qui auront vu son Mercutio qui crevait la scène (comme on crève l’écran) du Roméo et Juliette selon Thomas Jolly auront gardé dans l’œil sa silhouette athlétique, mais surtout le souvenir de sa voix : ce baryton sombre et clair à la fois, aux mots mordants, à la ligne impeccable, à la justesse stellaire, avec dans le timbre même comme le rappel d’un âge d’or perdu du chant français, celui des Endrèze, des Blanc, c’est Huw Montague Rendall dont parait ici le premier album.

Bon sang ne saurait mentir, le jeune homme a hérité de son père David Rendall, fabuleux ténor mozartien, la ligne de chant instrumentale, et de sa mère, Diana Montague, les mots et les affects du théâtre.

Ce Pelléas majeur – quel dommage que rien de son rôle phare ne figure sur l’album – sera-t-il un jour Golaud ? Son formidable Hamlet, par quoi s’ouvre l’album, semble l’annoncer, car cette voix de mots si clairs sait s’assombrir pour le Prince du Danemark dont il renouvelle la psyché depuis l’exemple laissé par Thomas Hampson.

Le panorama est vaste, comme Thomas Hampson, décidément modèle probable, il se risque aux Lieder eines fahrenden Gesellen, en saisissant toute la poésie que partage dans les inflexions de son chant les Rouennais si idéalement conduits par Ben Glassberg qui aura porté l’opéra normand à un niveau international en trois saisons.

Il ose le Tanzlied des Pierrot de Die tote Stadt où s’évoque les tendresses du chant d’un Hermann Prey, il envole le scherzo de Mab évidemment, fait un impeccable Valentin, exalte les nostalgies de Chanson triste (comme j’aurai préféré L’Invitation au voyage, La vie antérieure…) et sait charmer sans sucre chez Messager ou Hammerstein, surtout il sera troublant au possible en Billy Budd avec le piccolo de Kouchyar Shahroudi.

Et Mozart ? Comte des Nozze déjà fabuleux (et qui prouve que vocalement Golaud est dans ses cordes), Don Giovanni en charmes sulfureux, surtout un épatant Papageno face à la Papagena mutine d’Elisabeth Boudreault et aux boys du Trinity College.

Mais le dernier mot sera pour Mahler, l’esseulement du solitaire retranché du monde, cet Ich bin der Welt abhanden gekommen chanté comme du Schubert qui semble lui destiner pour demain Winterreise.

LE DISQUE DU JOUR

Contemplation

Œuvres de Ambroise Thomas (Hamlet), Charles Gounod (Faust, Roméo et Juliette), Erich Wolfgang Korngold (Die tote Stadt), Gustav Mahler (Lieder eines fahrenden Gesellen, Ich bin der Welt abhanden gekommen), Benjamin Britten (Billy Budd), Henri Duparc (Chanson triste), Wolfgang Amadeus Mozart (Le nozze di Figaro, Don Giovanni, Die Zauberflöte), André Messager (Monsieur Beaucaire), Richard Rodgers (Carousel)

Huw Montague Rendall, baryton

Elisabeth Boudreault, soprano (Mozart, Zauberflöte)
Oliver Bartow, Sam Jackman, Benjamin Gilbert,
sopranos garçons (Mozart, Zauberflöte)

Opéra Orchestre Rouen Normandie
Ben Glassberg, direction

Un album du label Erato 5021732363787
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Photo à la une : le baryton Huw Montague Rendall – Photo : © Anthony Dehodencq

Noces de sang

Das Klagende Lied, le conte horrifique, chef-d’œuvre absolu du jeune Gustav Mahler, manquait à la discographie de Michael Gielen. Miracle !, la Radio autrichienne avait conservé l’exécution fulgurante qu’il en avait donnée le 8 juin 1990, la voici enfin publiée Continuer la lecture de Noces de sang