Quel grand écart entre les images ourlées de révérences baroques de la Suite Holberg de Grieg et l’atelier radical des trois Pièces, Op. 59 qui prouvent que Carl Nielsen inventa autant à son piano que devant son orchestre. Continuer la lecture de Boréades
Archives par mot-clé : Edvard Grieg
L’unique Sonate
Daniel Lozakovich et Mikhail Pletnev l’avouent : ils voulaient rendre hommage à l’enregistrement légendaire de la Troisième Sonate de Grieg gravée par Fritz Kreisler et Sergei Rachmaninoff, faire écho en lui proposant une réponse moderne.
Pour admirable que soit leur version, emplie par l’esprit des musiques populaires, la perle du disque est ailleurs. Leur Sonate de Franck, enténébrée, scrutée dans chaque mesure, d’une intensité expressive qu’autorisent des tempos immenses, est un bijou noir. La sonorité si pleine du violon m’intrigue plus encore que les phrasés admirables dont je sais le violoniste coutumier : il joue le Sancy qui avait inspiré à Ivry Gitlis une merveilleuse version de cette même Sonate avec Martha Argerich ; l’alliage de cette sonorité profuse avec l’art du jeune homme est simplement magique, tout comme le dialogue avec un Mikhail Pletnev maître du temps.
Le disque s’ouvre sur une prégnante Chanson de Solveig, fait une pause chez Chostakovitch avec la Romance faussement désuète tirée de la musique pour Le Taon, ajoute la Sonate pour violon et piano où Mikhail Pletnev a aidé la plume d’Alexey Shor, musique sans façon qui s’écoute et s’oublie aisément, comme la Sonate pour piano solo captée lors d’un concert donné à Berlin le 5 avril 2023 dont Farao édite des extraits.
Les Intermezzi de Brahms comme joués hors du monde, en sonorité dorée, les quatre opus de Chopin si singuliers dans leurs dictions, leurs rythmes, leurs accents, rappellent, quitte à froisser certains, le génie de ce relecteur impénitent qui semble inventer sous nos yeux les étranges voyages de la Polonaise-Fantaisie.
LE DISQUE DU JOUR
Edvard Grieg (1843-1907)
Peer Gynt, Op. 23 – Chanson de Solveig (version pour violon et piano)
Sonate pour violon et piano No. 3 en ut mineur, Op. 45
César Franck (1822-1890)
Sonate pour violon et piano
en la majeur, CFF 123
Dmitri Chostakovitch
(1906-1975)
Suite pour « Le Taon », Op. 97a – Romance (No. 8 ; version pour violon et piano)
Alexey Shor (né en 1970) / Mikhail Pletnev (né en 1957)
Sonate pour violon et piano (d’après le « Concerto pour violon No. 4 » de Shor)
Daniel Lozakovich, violon
Mikhail Pletnev, piano
Un album du label Warner Classics 5021732285805
Acheter l’album sur Amazon.fr ― Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com
Live at Berliner Philharmonie, 5 April 2023
Johannes Brahms
(1833-1897)
3 Intermezzi, Op. 117
Alexey Shor (né en 1970) /
Mikhail Pletnev (né en 1957)
Sonate pour piano
en la mineur
Frédéric Chopin (1810-1849)
Polonaise en ut dièse mineur, Op. 26 No. 1
Fantaisie en fa mineur, Op. 49
Barcarolle en fa dièse majeur, Op. 60
Polonaise-fantaisie en la bémol majeur, Op. 61
Mikhail Pletnev, piano
Un album du label Farao Classics B108125
Acheter l’album sur le site du label Farao Classics, sur le site www.uvmdistribution.com, ou sur Amazon.fr ― Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com
Photo à la une : le pianiste Mikhail Pletnev et le violoniste Daniel Lozakovich – Photo : © Sasha Gusov
Le magicien
Dans les archives de l’INA dormait un témoignage relativement fragilisé de la Totentanz de Liszt. Cziffra y dispensait un vaste clavier entre méditation et fureur, Roberto Benzi, avec une pointe de génie, lui faisait un cortège très sombre. Continuer la lecture de Le magicien
Paysages et contes
Surprise !, l’orchestre ne manque pas à la Suite Holberg, Andrey Gugnin l’imaginant du clavier alerte de son beau Bechstein, faisant surgir autant de personnages que de paysages, vraie musique de scène pour dix doigts.
Ce que tant de pianiste refusent à Grieg, le génie de la narration, le cantonnant aux vertus illustratives d’un aquarelliste, Gugnin le possède à un degré singulier. C’est ce qui rend les deux cahiers de Pièces Lyriques si émouvants sous ses doigts : écoutez le petit ballet de la Sylfide, ses entrechats mystérieux, l’estompe jamais aussi debussyste de Phantom : quel Septième Cahier !
Tant de raffinement culminera dans l’Erotikon du Troisième Cahier, mais Andrey Gugnin emploiera également toute sa science pianistique aux variations de la Ballade, cahier majeur de la littérature pianistique romantique, qu’il joue en en accroissant les mystères.
Disque magique, peut-être le plus beau de ce pianiste qui ne laisse jamais de me surprendre ; il ne doit pas en rester là chez Grieg : la Sonate, d’autres cahiers des Pièces Lyriques veulent son art.
LE DISQUE DU JOUR
Edvard Grieg (1843-1907)
Holberg Suite, Op. 40 (version pour piano seul)
Pièces lyriques, Volume VII, Op. 62
Ballade en forme de variations sur un thème populaire norvégien, Op. 24
Pièces lyriques, Volume III, Op. 43
Andrey Gugnin, piano
Un album du label Hypérion Records CDA68424
Acheter l’album sur le site du label Hypérion Records, sur le site www.clicmusique.com, ou sur Amazon.fr ― Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com
Photo à la une : le pianiste Andrey Gugnin – Photo : © Boris Scitar
Plus de lumière
Le titre du papier ne veut pas paraphraser Goethe, dont le « Mehr Licht » avait une portée métaphysique. Chez Neville Marriner la lumière était à la fois une philosophie – rendre tout le texte et rien que le texte – et une politesse : faire tout sonore et accessible, aux auditeurs de ses concerts comme à ceux de ses disques Continuer la lecture de Plus de lumière