Bruckner, la cause est entendue, Takashi Asahina en est devenu, même en Occident, un apôtre jusqu’à Chicago et en passant par Berlin et Hambourg, mais Mahler ? Il le réserva au public nippon, avec des bonheurs variés Continuer la lecture de Grande Sixième
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Centenaire
Dans l’univers singulier des organistes, Jeanne Demessieux est un mythe. Enfant prodige, pianiste virtuose, sa rencontre au Conservatoire National de Musique de Paris avec Marcel Dupré en 1936 changea la donne : Magda Tagliaferro perdait son élève la plus brillante, elle préférerait désormais l’orgue au piano, d’ailleurs dès sa douzième année, elle avait accepté la charge de tenir l’orgue de l’Eglise du Saint-Esprit que l’Archevêque de Paris venait de consacrer.
Les rapports avec Dupré furent houleux, Jeanne Demessieux avait un caractère bien trempé, sa virtuosité époustouflante, son goût pour un jeu brillant et volontiers extérieur allant à l’encontre de la spiritualité et du style intériorisé de Marcel Dupré finirent par les brouiller irrémédiablement en 1947. Son répertoire colossal (plus de 2500 œuvres, de Bach à ses contemporains), sa mémoire infaillible (elle jouait uniquement par cœur) rappellent qu’elle fut d’abord compositeur : elle entendait les œuvres en les lisant.
Carrière fulgurante, sur tous les orgues d’Europe, des cycles entiers consacrés à toute l’œuvre de Bach, un appétit pour la musique de son temps peu partagé par ses confrères, et dans tout ce qu’elle jouait une flamme inextinguible dont un terrible cancer eut raison le 11 novembre 1968. Elle avait quarante-sept ans.
Cyrus Meher-Homji réédite à l’occasion de la célébration du centenaire de sa naissance l’intégrale des enregistrements effectués par Decca, la plupart étaient demeurés inédits en CD. Les récitals Bach où elle jouait l’orgue du Victoria Hall de Genève, montrent son style altier, ses tempos prestes, ses registrations lumineuses (écoutez le Concerto BWV 593 d’après Vivaldi), l’intégrale de l’œuvre d’orgue de César Franck à l’orgue de la Madeleine dont elle fut titulaire à compter de 1962 est restée justement mythique.
Proche d’Olivier Messiaen, elle s’apprêtait à enregistrer toute son œuvre d’orgue pour Decca lorsque les premiers signes de la maladie apparurent. Elle n’aura pas eu le temps que de graver quoi que ce soit du compositeur, mais l’éditeur ajoute ici un concert capté par la BBC où elle joue avec ferveur Transports de joie, troisième pièce de L’Ascension.
Coffret exemplaire assorti d’un vaste ensemble de photographies et de documents divers, avec un texte remarquable d’Arcy Trinkwon.
Comme un bonheur n’arrive jamais seul, St-Laurent Studio publie un double album de captations en concert, où elle joue avec orchestre. Le concert du 4 mai 1952 avec l’Orchestre Radio-Symphonique de Paris dirigé par Eugène Bigot, donne à entendre le magnifique Poème pour orgue et orchestre, son Opus 9, mais aussi le Premier Concerto de Jean Langlais ainsi qu’un surprenant Concerto en sol mineur de Haendel.
En seconde partie, une 3e Symphonie de Saint-Saëns où la poésie égale le brio (une partie du Poco Adagio manque hélas). Mais vous courez à l’autre concert : en 1966, à quelques mois des premières manifestations de son cancer, elle donne une lecture époustouflante du Concerto de Poulenc, autant de documents essentiels qui me font regretter qu’elle n’ait pas plus enregistré, et que le temps lui ait manqué pour jouer des instruments autres que ceux des grands facteurs des XIXe et XXe siècles.
LE DISQUE DU JOUR
Jeanne Demessieux
The Decca Legacy
Johann Sebastian Bach (1685–1750)
Toccata et Fugue en ré mineur, BWV 565 (3 enregistrements : 1947, 1951, 1955)
Prélude et Fugue en ré majeur, BWV 532
Toccata, Adagio et Fugue en ut majeur, BWV 564
Prélude et Fugue en la mineur, BWV 543
Toccata et Fugue en fa majeur, BWV 540
Fugue à la gigue en sol majeur, BWV 577
Fantasia et Fugue en sol mineur, BWV 542
Grande pièce d’orgue (Fantasie) en sol majeur, BWV 572
Prélude de choral « Wenn wir in höchsten Nöten sein », BWV 641
(No. 43, extrait de « Das Orgel-Büchlein, BWV 599-644 »)
Prélude de choral « Nun komm’ der Heiden Heiland », BWV 659
(No. 9, extrait des « 18 Préludes de choral, BWV 651-668 »)
Prélude de choral « Jesus Christus, unser Heiland », BWV 688
(No. 20, extrait de la « Clavier-Übung III »)
Prélude de choral « O Mensch, bewein dein Sünde groß », BWV 622
(No. 24, extrait de « Das Orgel-Büchlein, BWV 599-644 »)
Prélude de choral « Christ, unser Herr, zum Jordan kam », BWV 684
(No. 16, extrait de la « Clavier-Übung III »)
Prélude de choral « Erbarm dich mein, o Herre Gott », BWV 721
Prélude de choral « Liebster Jesu, wir sind hier », BWV 731 (2 versions)
Concerto pour orgue en la mineur, BWV 593
Sinfonia, extraite de la Cantate « Wir danken dir, Gott, wir danken dir », BWV 29 (transcription : Marcel Dupré)
Bist du bei mir, BWV 508
Komm, süsser Tod, komm, selge Ruh’, BWV 478
Warum betrübst du dich, BWV 516
Suzanne Danco, soprano
Dieterich Buxtehude (1637–1707)
Fugue en ut majeur, BuxWV 174
Jeremiah Clarke (1674–1707)
Trumpet Tune (transcription : Marcel Dupré)
Heinrich Schütz (1585–1672)
Eile mich, Gott, zu erretten, SWV 282
Georg Friedrich Haendel (1685–1759)
Concerto pour orgue et orchestre en sol mineur, Op. 4 No. 1, HWV 289
Concerto pour orgue et orchestre en si bémol maj, Op. 4 No. 2, HWV 290
L’Orchestre de la Suisse Romande – Ernest Ansermet, direction
Felix Mendelssohn-Bartholdy (1809–1847)
Sonate pour orgue en la majeur, Op. 65 No. 3, MWV W 58
(extrait : I. Con moto maestoso)
Wolfgang Amadeus Mozart (1756–1791)
Adagio et Fugue en ut mineur, KV 546/426
(transcriptions : Jeanne Demessieux [Adagio] et Marcel Dupré [Fugue])
Fantasia en fa mineur, KV 608
Franz Liszt (1811–1886)
Fantasie und Fuge über den Choral « Ad nos, ad salutarem undam », S. 259
Präludium und Fuge über den Namen B.A.C.H, S.260
Olivier Messiaen (1908–1992)
L’Ascension (extrait : III. Transports de joie d’une âme devant la gloire du Christ qui est la sienne)
César Franck (1822–1890)
3 Pièces pour grand orgue, FWV 35-37 (2 versions, hors No. 3)
3 Chorals pour orgue, FWV 38-40 (2 versions)
Fantaisie en ut majeur
Grande pièce symphonique en fa dièse mineur, Op. 17
Prélude, Fugue et Variation en si mineur, Op. 18
Pastorale en mi majeur, Op. 19 (2 versions)
Prière en ut dièse mineur, Op. 20
Final en si bémol majeur, Op. 21
Charles-Marie Widor (1844–1937)
Symphonie No. 5 en fa mineur, Op. 42 No. 1 (extrait : I. Allegro vivace)
Symphonie No. 5 en fa mineur, Op. 42 No. 1 (extrait : V. Toccata – 2 versions)
Symphonie No. 9 en ut mineur, Op. 70 « Gothique » (extrait : IV. Moderato)
Symphonie No. 6 en sol mineur, Op. 42 No. 2 (extrait : I. Allegro)
Édouard Mignan (1884–1969)
Toccata médiévale
Jean Berveiller (1904–1976)
Mouvement (2 versions)
Jeanne Demessieux (1921–1968)
Te Deum, Op. 11
Improvisation sur un thème proposé par Adrian Beaumont
Un coffret de 8 CD du label Decca 4841424 (Collection Eloquence Australia)
Acheter l’album sur le site de la collection Eloquence Australia, sur le site www.ledisquaire.com, ou sur Amazon.fr – Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com
Georg Friedrich Haendel (1685-1759)
Concerto pour orgue en sol mineur, Op. 4 No. 1, HWV 289
Jeanne Demessieux (1921-1968)
Poème pour orgue et orchestre, Op. 9
Jean Langlais (1907-1991)
Premier Concerto pour orgue ou clavecin et orchestre
Camille Saint-Saëns (1835-1921)
Symphonie No. 3 en ut mineur, Op. 78, R. 176
Jeanne Demessieux, orgue – Orchestre Radio-Symphonique de Paris –
Eugène Bigot, direction
Enregistré à Paris, à la Salle Pleyel, le 4 mai 1952
Francis Poulenc (1899-1963)
Concerto pour orgue, orchestre à cordes et timbales en sol mineur
Jeanne Demessieux, orgue – Orchestre Philharmonique de l’O.R.T.F. –
Edgar Cosma, direction
Enregistré à Paris le 24 avril 1966
Un album de 2 CD du label St-Laurent Studio YSL1121-T
Acheter l’album sur le site du label www.78experience.com
Photo à la une : l’organiste Jeanne Demessieux – Photo : © DR
Révélation
Le concert avait été radiodiffusé, une bonne âme l’aurait probablement capté, longtemps la Sixième de Mahler donnée par Mitropoulos et les Wiener Philharmoniker fut un serpent de mer, je désespérai de ne jamais l’entendre Continuer la lecture de Révélation
Gloria
Les accords abrupts qui ouvrent le Concerto pour deux pianos font un peu craindre le pire, Poulenc lui-même, sans son Jacques Février, n’est pas si à son aise, mais l’excellente Evelyne Crochet va vite l’assurer Continuer la lecture de Gloria
La grande Lili
À la fin, elle qui jouait Bartók et Beethoven, Mozart lui aura été mieux que son compositeur chéri, un autre soi-même, et ses Concertos enregistrés modestement à Vienne, avec un orchestre modeste et un chef modeste, le pain quotidien. Continuer la lecture de La grande Lili