Un chef pour l’opéra, exclusivement pourrait-on croire ? À Rome, à Londres, Antonio Pappano a fait beaucoup, et dans l’excellence, pour rendre le portrait aussi exact que possible, au point de faire oublier des discophiles le travail éclairant qu’il opéra à Rome, ressuscitant l’Orchestra dell’Accademia Nazionale di Santa Cecilia, la formation tant aimée de Victor de Sabata, d’Antonio Guarnieri, de Bernardino Molinari, de Franco Ferrara, lui redonnant plus que son lustre d’antan, une vraie sonorité pour le nouveau siècle, et une ouverture vertigineuse sur le répertoire. Continuer la lecture de Saga Romaine
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La voix de Londres
Un pot-pourri ? Un coffre aux trésors. Plongeant dans le continent oublié des 78 tours Decca, Cyrus Meher-Homji aura chargé Ward Marston, Mark Obert-Thorn et Andrew Hallifax de s’atteler à la résurrection de tout un pan oublié du label britannique, celui des enregistrements orchestraux. Continuer la lecture de La voix de Londres
Jeux
Depuis sa création le 15 mai 1913, au Théâtre des Champs-Elysées sous la baguette de Pierre Monteux, Jeux effrayait les orchestres, mais aussi les chefs. Debussy y avait écrit tout un nouveau monde de sons et de rythmes qui allaient plus loin encore dans l’abstraction lyrique que ne l’avait fait la simple complexification métrique du Sacre du printemps.
Comme aimait à le rappeler Pierre Boulez, Jeux est l’alpha de l’orchestre moderne. Monteux lui-même l’aura dompté pour le ballet – deux lectures en concert témoignent de sa mise en place au cordeau – mais ce seront les chefs d’orchestre dévolus à la musique de leur temps, Bruno Maderna puis Pierre Boulez qui en saisiront toute l’importance historique, précédés au disque par deux pionniers : Victor de Sabata, lui-même compositeur, et Ernest Ansermet.
Octobre 1953, Victoria Hall, Gil Went et Roy Wallace règlent leurs micros pour saisir ce qui deviendra la version la plus parfaite du chef-d’œuvre de Debussy enregistrée alors. Si Ansermet se souvient du ballet – ses tempos sont ceux des danseurs – il fait entendre avec une impérieuse sensualité chaque repli harmonique de cette langue si neuve, pliant, dépliant, froissant, défroissant son orchestre qui semble un grand félin dans la nuit.
Cette poésie gorgée de timbres où danse encore le souvenir du faune languide, si sensuel, torride comme une nuit d’été, vous enveloppe littéralement d’une symphonie de sons. Abstrait et érotique pourtant. Ansermet refera d’autres Jeux tout aussi réussis (et peut-être plus fluides, de mouvements moins détaillés, ici on voit les beaux muscles), je vous en ai causé il n’y a pas si longtemps, mais il faut connaître ceux-ci, enregistrés pour faire exemple, et qui sont pourtant la vie même.
L’éditeur ajoute la version la moins connue de La Mer (octobre 1957) selon le chef helvète, un rien plus sombre que les trois autres moutures, et passe aux séances parisiennes dévolues à Paul Dukas : L’Apprenti sorcier narré comme un tranquille cauchemar, mais surtout et pour la première fois rééditée en stéréophonie, La Péri (sans sa Fanfare), torpide, sensualiste, emperlée, toute en diaprures, un Orient de sons qui tourne immanquablement la tête. Ernest Ansermet était décidément bien plus que l’esprit cartésien auquel certains veulent le réduire.
LE DISQUE DU JOUR
Claude Debussy (1862-1918)
La Mer, L. 111(enr. 1957)
Jeux, L. 133 (enr. 1953)
Paul Dukas (1732-1809)
La Péri
L’Apprenti sorcier
L’Orchestre de la Suisse Romande, mezzo-soprano
Orchestre de la Société des Concerts du Conservatoire
Ernest Ansermet, direction
Un album du label Decca 4824975 (Collection « Eloquence Australia »)
Acheter l’album sur le site de la collection Eloquence Australia, sur le site www.ledisquaire.com, ou sur Amazon.fr – Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com
Photo à la une : Le chef d’orchestre Ernest Ansermet – Photo : © OSR
Symphonies de guerre
Le disque est un révélateur, surtout lorsqu’il rend accessible coup sur coup deux symphonies majeures du XXe siècle italien, toutes deux dans la même tonalité, et je crois bien que l’opus d’Ildebrando Pizzetti enregistré en première mondiale.
L’œuvre de Gino Marinuzzi, à l’instar de celle de Victor de Sabata Continuer la lecture de Symphonies de guerre
Elgar romain
Pour les orchestres anglais, les symphonies d’Elgar sont le pain quotidien, ils les jouent les yeux fermés. Mais ailleurs, les formations symphoniques sont comme vierges lorsqu’elles les découvrent : leurs polyphonies sombres Continuer la lecture de Elgar romain